Né à Kielce, en Pologne, Gershon Iskowitz se découvre très tôt une prédilection pour l’art. Son père l’encourage dans cette voie, mais le monde du jeune artiste s’effondre avec l’éclosion de la Deuxième Guerre mondiale. Toute sa famille est assassinée par les nazis et le garçon est ballotté d’un camp de concentration à l’autre durant les six années suivantes. Iskowitz affirme avoir survécu en dessinant sur des bouts de papier la nuit. Après sa libération, il poursuit son éducation classique à Munich (Allemagne), en France et en Italie et étudie auprès du peintre autrichien Oskar Kokoschka.
Iskowitz immigre au Canada en 1949. Il continue de peindre les mauvais souvenirs de la guerre qui le hantent. En 1967, il a un nouvel élan d’inspiration lorsque, grâce à une subvention du Conseil des arts du Canada, il a l’occasion de survoler le Manitoba en hélicoptère. Peu de temps après, sa formation classique et son émerveillement pour les vues aériennes s’amalgament dans des abstractions dynamiques et colorées. En 1972, sa trajectoire artistique commence à se dessiner. Au fil des années 1970, Iskowitz « laisse peu à peu le rideau de tachetures remplir le plan pictural » de ses toiles et fait appel à des couleurs plus intenses pour accentuer le contraste.
Au moment de peindre Red G, Iskowitz est déjà un artiste reconnu au Canada. Son succès comme peintre est exceptionnel alors même que le milieu des arts proclame que « la peinture est morte » et que les artistes voient leurs huiles reléguées au passé. Cependant, ce n’est pas la première fois qu’on annonce la mort de la peinture et Iskowitz connaît le pouvoir du temps. Il se dévoue à son art et persiste humblement à croire que son travail trouvera un écho auprès des artistes du futur. « C’est très important de léguer quelque chose, dit-il, si l’on veut que la prochaine génération puisse croire en quelque chose. À mon avis, l’artiste travaille avant tout pour lui-même. Tous les artistes connaissent des périodes de crainte, d’amour ou autre et doivent lutter jour après jour pour survivre, comme tout le monde. […] Nous cherchons à faire le bien, à nous tailler une place. L’histoire peut en témoigner ; c’est ce qui nous anime. » [Nous traduisons.] À sa mort, Iskowitz lègue un monde d’espoir rempli de peintures colorées inspirées de la liberté et du paysage canadien.
Iskowitz est un des deux artistes à représenter le Canada à la Biennale de Venise en 1972. Dix années plus tard, le Musée des beaux-arts de l’Ontario lui rend hommage en lui consacrant une importante rétrospective. Une version de cette exposition est par la suite présentée à Londres, au Royaume-Uni. Les travaux d’Iskowitz font partie des collections de presque tous les grands musées d’art du Canada.
(Emma Richan)