Les nus réalisés par Jean Paul Lemieux durant les années 1960 se rapportent à la fois au paysage et au personnage, liés par l’art du camaïeu dans un esprit de dépouillement complice. Dans ce tableau daté de 1963, les bruns chauds du feuillage en broussaille s’ouvrent sur un sentier clair, puis une brèche lointaine rappelant le lit d’un ruisseau. Un lavis sec, brossé sommairement sur la toile, est soutenu par quelques troncs d’arbres frêles, renvoyant à la silhouette tronquée de la jeune fille qui fait son entrée dans le coin inférieur droit du tableau.
Le buste de face, bras légèrement tourné vers l’arrière, ainsi que la tête en position trois-quarts marquent un mouvement subtil en direction de la sente. Quelques touches sont suffisantes pour annoncer sa présence, tout en retenue, et dont l’ombre projetée au sol rejoint déjà le chemin. L’oeuvre se présente comme une variation contemporaine sur le thème de la baigneuse, surprise dans sa nudité bourgeonnante, dans son intimité, à l’orée du plan de lumière vers lequel elle se dirige. Cette huile annonce une série de grands nus (Le Grand Nu et Nu, 1966; Nu printanier, 1968) qui occuperont l’espace pictural de la tête aux pieds ou en plan américain, dictant ainsi la composition du tableau. (A. L.)