Avec Double 30 (Azo-cobalt), daté de 1975, Claude Tousignant signe ici un des classiques de son répertoire : le diptyque circulaire. En effet, cette œuvre emblématique s’inscrit dans une série de tondos et de tableaux-formes qui ont valu à l’artiste une renommée internationale. Les Gongs, les Transformateurs chromatiques et les Accélérateurs chromatiques ouvrent ainsi la voie aux éléments doubles qui apparaissent en 1970 et qui s’achèvent en 1980. Cette année-là, une exposition individuelle au Musée d’art contemporain de Montréal est entièrement consacrée aux diptyques.
Une vibrante structure sérielle domine les cibles à bandes concentriques de couleurs tantôt saturées, tantôt fluorescentes, qui invitent le spectateur à une expérience optique rafraîchissante, et ce, près de 50 ans après leur réalisation. En réduisant le nombre de bandes, puis en les élargissant, l’artiste cherche d’abord à intensifier la présence des champs chromatiques. Grâce à la réversibilité des couleurs aux contrastes optimaux, ainsi qu’à leur position hiérarchique dans la cible, un solide lien de parenté se crée entre les deux éléments rendus indissociables.
Double 30 (Azo-cobalt) comporte quatre cercles concentriques qui semblent recouverts « d’une sorte de film lumineux qui n’est que le produit de la vibration optique », fait remarquer James D. Campbell. À propos de l’effet recherché, Tousignant souhaitait « que la confrontation de ces couples de couleurs, lesquels, par leur juxtaposition, produisent pour ainsi dire une troisième couleur, établisse une suite de rapports entre ces troisièmes couleurs ». Campbell insiste d’ailleurs sur le rapport espace-couleur dans l’œuvre du peintre comme l’expression d’une « dimensionnalité imposante, une présence magnifiée qui peut être puissamment éloquente et qui peut attirer le spectateur dans un champ de gravitation dont il n’échappera qu’à regret ».
(A. Lafleur)