Au tournant des années 1980, Jean Paul Lemieux opte résolument pour une approche plus symbolique de la peinture, fondée sur un regard intérieur et une élévation du sentiment, qui, une fois transposée visuellement par une série de procédés formels, transcende l’espace pictural. Ces procédés se repèrent aisément dans la forme modulante des oeuvres, leurs lignes diagonales, souvent obliques, les jeux d’échelles et de plans et la présence soutenue de figures en opposition avec la scène, qui sont peintes soit en très gros plan, soit de dos ou floutées. Sans titre (1980) rassemble les éléments incontournables de cette période, ainsi que ceux qui ont fait la marque du peintre tout au long de sa carrière, à savoir la scène hivernale, l’horizon et l’immensité, le ciel chargé de neige et le personnage solitaire emmitouflé avec chapeau et foulard affichant une expression à la fois digne, sincère et sensible. À propos de cette période, Marie Carani constate que « plusieurs dessins et tableaux tardifs de Lemieux racontent […] le grand drame de l’homme contemporain. […] Toutes les oeuvres concernent ainsi les problèmes de l’être et du néant, de la vérité et de l’illusion, du visage et du masque » (Jean Paul Lemieux, Musée du Québec et Publications du Québec, 1992).
À partir de la fin des années 1950 et durant les dix années suivantes, la réputation de Lemieux connaît une croissance spectaculaire tant au Canada qu’à l’étranger. Son oeuvre fait l’objet d’expositions exclusives à Montréal, à Québec, à Toronto et à Vancouver et figure dans quatre expositions biennales du Musée des beaux-arts du Canada. Certains tableaux font partie d’expositions d’art canadien à la Biennale de São Paulo, à l’Exposition internationale de Bruxelles, au Museum of Modern Art de New York, à la Tate Gallery de Londres et au Palais Galliera de Paris. En 1960, Lemieux compte parmi les artistes choisis pour représenter le Canada à la Biennale de Venise. En 1966, il devient membre de l’Académie royale des arts du Canada. En 1967, il est décoré de la médaille du Conseil des arts du Canada et en 1968, il est fait Compagnon de l’Ordre du Canada.