Étoile rouge (1979, série Les Étoiles) porte toutes les marques distinctives de Lemoyne : le tricolore, le motif triangulaire incarné par l’étoile, les rayures, la gestualité et le dripping. Une oeuvre emblématique du peintre originaire d’Acton Vale parvenu au sommet de son art.
La série Pointe d’étoile (1977-1978) ouvre la voie vers Les Étoiles (1979), où se renouvelle sans cesse la posture du triangle – omniprésent dans l’oeuvre de Lemoyne –, prolongement naturel des shaped canvas (v. 1955) des premiers Plasticiens Louis Belzile et Fernand Toupin, puis de ceux des peintres Frank Stella et Ellsworth Kelly au milieu des années 1960. Les motifs de l’étoile et de la rayure nous ramènent inévitablement au célèbre tableau de Jasper Johns intitulé Flag (1955), ce drapeau américain figé sous une couche d’encaustique, technique ancestrale. Similairement, Lemoyne revisite, déconstruit et réinterprète cette icône moderne de la peinture au moyen de l’huile, de l’émail et de l’acrylique, savant mélange de techniques qui se prête à plusieurs styles allant du post-expressionnisme abstrait au tachisme en passant par le color-field. C’est donc tout un pan de son oeuvre qu’il réintègre en positionnant figure, gestuelle et facture au premier plan du tableau.
La série Les Étoiles marque par ailleurs la fin du cycle Bleu, Blanc, Rouge, que l’artiste s’était imposé une décennie durant, et ouvre par le fait même un nouveau chapitre où celui-ci explore de plain-pied la modernité picturale, délaissant l’iconographie populaire au profit d’un langage purement plastique. Les tableaux à venir élèveront la peinture au rang de l’imagerie sportive telle qu’elle se déploie dans les oeuvres du milieu des années 1970. Autrement dit, la matière y occupera plus que jamais la place principale.