Si Hurtubise démontre un grand intérêt pour les peintres et les courants américains lors de son séjour à New York au début des années 1960, il s’en distanciera avec ambition dans les années suivantes, préférant la quête d’un métissage plastique capable de transcender la perception. La tache ou le splash, qu’il étudie sous toutes ses coutures, demeure le sujet principal de ses tableaux. Hurtubise réinterprète le geste expressionniste abstrait et la pratique du all-over dans un style hard-edge qui conditionne et décompose la ligne et le plan, comme une suite d’arrêts sur image. Ainsi, dans Denise (1968), les motifs se répètent et suivent un tracé à la fois régulier et asymétrique, créant un espace illusionniste dynamique, une présence totale. « Chacune des arrêtes [des] cellules – les côtés et la diagonale – est l’axe de symétrie d’une forme vibratoire, au contour en zigzag. Ces formes sont remplies d’une peinture posée en aplat. Leurs couleurs sont celles, à la limite du visible, qu’affectionne Hurtubise : le jaune, le rose chair, le vert chartreuse et le cyan », commente François-Marc Gagnon sur un tableau similaire, Nicotine, peint une année plus tôt. À partir de 1965, l’artiste baptise nombre de ses tableaux de prénoms féminins, ajoutant une touche sibylline à sa mythologie personnelle. (A. L.)